Le mauvais calcul des Gafa, OpenAI s'attaque aux droits d'auteur, Nvidia à l'offensive

Et aussi: Bruxelles n'abandonne pas le DMA – Chrome et Safari menacés au Royaume-Uni

Cafétech
4 min ⋅ 21/03/2025

Tous les vendredis, l’édition hebdomadaire de Cafétech vous propose un tour d’horizon des principales actus tech de la semaine écoulée.

Bonne lecture et bon week-end.


| GRAND ANGLE |

Face aux Gafa, l'administration Trump montre les muscles

En prêtant allégeance de manière aussi éhontée à Donald Trump, les géants technologiques américains espéraient de la nouvelle administration un traitement plus favorable que celui réservé par la précédente. Mais leur calcul politique n’a pas porté ses fruits. Deux mois après la passation de pouvoir, tous les signes pointent en effet vers un climat au moins aussi difficile. Non seulement les procédures contre Google, Apple ou Meta pour des pratiques jugées anticoncurrentielles, principalement lancées pendant le premier mandat du président américain, se poursuivent sans réelle perspective d’assouplissement. Mais un nouveau front pourrait aussi s’ouvrir: celui d’une prétendue censure des discours conservateurs. Un rappel que les groupes tech restent, malgré leurs efforts parfois grossiers, une cible de choix dans le camp trumpiste.

“L’une de nos priorités” – Cette approche est illustrée par les responsables choisis par Donald Trump, peut-être sous l’influence de son vice-président JD Vance. Aux États-Unis, la politique de la concurrence est menée par la Federal Trade Commission et par la division antitrust du département de la Justice. Le locataire de la Maison Blanche a choisi de placer à leur tête deux responsables connus pour leurs critiques contre la position dominante des grandes sociétés tech. “Elles restent l’une de nos priorités”, assure ainsi Andrew Ferguson, le nouveau patron de la FTC, qui promet de mobiliser “toutes les ressources nécessaires” pour les plaintes déposées contre Meta et Amazon. Lors de son audition de confirmation au Sénat, Gail Slater, nommée au DOJ, a tenu un discours similaire. Elle supervisera notamment les procédures contre Google et Apple.

Vente de Chrome – Les premières décisions de la nouvelle administration confirment une certaine continuité. Selon l’agence Bloomberg, la FTC a décidé de poursuivre l’enquête antitrust contre Microsoft déclenchée sous l’administration Biden. Celle-ci porte notamment sur le marché du cloud. Le groupe de Redmond est accusé, en particulier par Google, de se livrer à une vente liée au profit de sa plateforme Azure. Dans un autre dossier, le régulateur se penche sur l’étrange accord conclu l’an passé avec la start-up Inflection AI, qui pourrait être considéré comme une acquisition déguisée. De son côté, le DOJ a maintenu l’essentiel des demandes formulées en novembre dernier dans le cadre d’un procès contre Google. Il réclame toujours la vente du navigateur Internet Chrome afin de relancer la concurrence dans le domaine de la recherche en ligne.

Multiples dossiers – D’autres échéances approchent. Mi-avril, un procès doit s’ouvrir contre Meta. La FTC devrait alors demander à la justice américaine de contraindre le réseau social à revendre Instagram et WhatsApp. En septembre, le gendarme de la concurrence retrouvera aussi Amazon devant un tribunal. Le géant du commerce en ligne est accusé d’avoir trompé ses clients pour les pousser à s’abonner à son offre Prime. L’an prochain, il sera au cœur d’un procès pour abus de position dominante. Le DOJ sera, lui aussi, bien occupé. Au cours des prochains mois, il devra proposer des mesures correctives en cas de nouvelle condamnation de Google, cette fois-ci sur le marché des technologies publicitaires – le procès s’est tenu l’an passé. Il devra aussi poursuivre les poursuites antitrust lancées contre Apple. Et ses investigations sur Nvidia.

Pour aller plus loin:
– Mark Zuckerberg demande l’aide de Donald Trump contre l’Europe
– L’administration Trump menace le cadre européen sur le transfert de données


| À LIRE AILLEURS |

Les Européens peuvent-ils réduire à court terme leur dépendance aux armes américaines ? Faut-il s’inquiéter du déficit commercial français ? Que penser de l’accord de libre-échange UE-Mercosur ?

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| EN BREF |

OpenAI et Google réclament un assouplissement du droit d'auteur pour les modèles d'IA

Le discours est volontairement alarmiste. Dans un courrier adressé la semaine dernière à la Maison Blanche, OpenAI met à profit les avancées récentes de la start-up chinoise DeepSeek pour réclamer un assouplissement de la législation américaine sur le droit d’auteur. Le concepteur de ChatGPT demande ainsi d’inscrire dans la loi la notion de fair use – qui autorise un “usage raisonnable” des œuvres protégées – pour l’entraînement des modèles d’intelligence artificielle générative. “Ce n’est pas seulement une question de compétitivité américaine, c’est une question de sécurité nationale”, assure-t-il. Sa demande est reprise par Google, qui souligne que “l’utilisation de contenus […] sans d’impact significatif sur les ayants droit” permet d’éviter “des négociations souvent longues et imprévisibles avec les détenteurs de données”.


Face aux doutes, Nvidia dévoile de nouveaux GPU

Le lieu n’a pas changé, la forte affluence non plus. Mais le climat, lui, est bien différent. Finie l’euphorie autour de l’intelligence artificielle générative qui avait accompagné la précédente édition de la GTC, la conférence annuelle organisée par Nvidia. L’heure est désormais aux premiers doutes, comme le montre la chute de l’action de la société de Santa Clara depuis son plus haut historique touché début janvier. Le déploiement plus lent qu’espéré de la technologie dans les entreprises et les récentes avancées de la start-up chinoise DeepSeek posent en effet la question de la poursuite du rythme effréné d’investissements dans les data centers. Et en particulier dans les cartes graphiques (GPU) de Nvidia, nécessaires pour entraîner et faire tourner les modèles d’IA. “Nous sommes à un point d’inflexion”, rétorque Jensen Huang, son patron.


Malgré les menaces américaines, Bruxelles vise Google et Apple

Les responsables européens avaient promis de ne pas se laisser impressionner par les menaces de Donald Trump. Et ainsi de continuer à faire respecter le Digital Markets Act, le nouveau cadre réglementaire visant les géants du numérique. Mercredi, la Commission a tenu parole. Pour la première fois depuis le retour au pouvoir du président des États-Unis, elle a pris des mesures contre des groupes américains. Elle a d’abord officiellement lancé une procédure contre Google, estimant qu’il continue d’accorder un traitement préférentiel à ses propres services et qu’il continue de limiter la pratique de steering (redirection d’une application mobile vers un site Internet pour réaliser un achat). Bruxelles a aussi imposé des mesures “juridiquement contraignantes” à Apple afin de renforcer l’interopérabilité de ses systèmes d’exploitation iOS et iPadOS.


Klarna renoue avec les profits juste avant son introduction en Bourse

Un retour dans le vert qui tombe à pic pour Klarna. Juste avant son introduction en Bourse, le spécialiste suédois du “achetez maintenant, payez plus tard” a renoué l’an passé avec les profits. Des bénéfices très modestes d’à peine 21 millions de dollars, mais qui succèdent à des années de très lourdes pertes. En 2022, celles-ci s’étaient chiffrées à un milliard de dollars – probablement un record pour une start-up européenne. Depuis, Klarna a augmenté son volume d’affaires de 26% et accru ses recettes de 48%, tout en stabilisant le niveau de ses dépenses. Son patron Sebastian Siemiatkowski promet d’aller encore plus loin grâce à l’intelligence artificielle. Il assure que son chatbot permet déjà de remplacer 800 employés dans le service client. Et il compte ramener les effectifs à 2.000 personnes, contre 5.000 il y a trois ans.


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>> Le Royaume-Uni veut s'attaquer à la position dominante de Chrome et Safari

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Unsplash / Solen Feyissa

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Par Jérôme Marin

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